Arnaud cherche sa place dans la société. Soy Libre montre son insatiable désir de liberté au cours d'une quête de près de dix ans qui le mène du nord de la France au Pérou en passant par l'Espagne. Le portrait d'un frère qui ne cesse de grandir, dressé par sa grande sœur.
« En matière de documentaires, on distingue souvent les films sur (un sujet, une personne…) des films avec (celle, celui ou ceux que l’on filme). Soy libre appartient résolument à cette seconde catégorie, hostile à tout abus de pouvoir et prête à accueillir le spectateur sans aucun embarras dans ce qui est, en l’occurrence, bien plus qu’un simple film de famille : une authentique œuvre de cinéma. »
François Eckchajzer
« Ce qui m'intéresse dans le cinéma, c'est ce qui n'est pas figé, ce qui mue. Que ce soit le regard qu'on a sur quelqu'un qui se transforme, ou la personne elle-même. Indépendamment de cette histoire, c'est cela dont j'avais envie, déplacer le regard. Ici en particulier, ce récit parle d'une injustice qui demandait réparation, et il s'y passe de nombreuses choses que je n'avais même pas osé écrire. Parallèlement à cela, il a fallu concilier avec les envies d'Arnaud, ou son absence d'envie justement. Mais lorsqu'au début du film, il raconte son histoire, c'est quelque chose dont il avait extrêmement besoin. En ce sens, il a dépassé mes attentes, et cela m'a grandement influencé dans la construction du récit. »
Laure Portier
« J’ai toujours protégé mon frère : la seule personne qui puisse le malmener c’est moi, pas le spectateur, qui aura toujours tort. Quand je filme des gens que j’aime, il est évident que je les protégerai plus que je me protège. Dans ce film-ci ou le précédent il a fallu construire mon personnage au montage, et il y a des moments où ce n’est pas agréable, ou je me dis que je ne veux pas de cette place-là. Pourtant je l’accepte parce que ça nourrit le film et ça protège l’autre. »
Laure Portier
« Je crois que j’emploie le mot « sincère » dans le film. Le « vrai » je m’en fous un peu surtout quand il s’agit de cinéma, mais une forme de sincérité par contre… Le film est le lieu de notre rencontre, un lieu commun et un moteur pour nous dépasser, dépasser notre réflexion sur le monde, sur notre condition. »
Laure Portier
« La relation entre la portraitriste et son modèle ressemble à une collaboration artistique. Plusieurs scènes évoquent le film en cours, le film en train de se faire. Mises en abîme qui ne cherchent jamais à faire croire au public qu’il s’agit sur l’écran d’une vie sans filtre mais d’une vie saisie par le cinéma. Arnaud n’est pas un personnage soumis à sa « grande soeur-à-la-caméra » ; en voyage par exemple, c’est lui qui se filme, c’est lui qui se met en scène. Et indéniablement, il possède lui aussi certains talents de réalisateur, le sens du cadre, une application à fabriquer des « prises » utiles au montage, le flair de savoir rester silencieux lorsqu’il enregistre son réel. Ces séquences, ces « auto-séquences », ont même un style moins saccadé, moins mouvant, que dans les plans filmés par la réalisatrice, qui affectionne de suivre, caméra au poing, l’agitation, l’agilité de son petit frère, ce jeune téméraire. »
Benjamin Genissel