Comment, à travers le monde, sont considérés les morts à partir du moment où ils ne sont plus que souvenirs, matière livrée à la pourriture ? Pendant deux ans, Jean-Paul Ferbus, Dominique Garny et Thierry Zéno ont filmé des rites funéraires en Corée du Sud, en Thaïlande, au Mexique, en Belgique et aux États-Unis. Ces rites mortuaires possèdent en commun de montrer le caractère irréfragable de l’événement, mais aussi de le refuser et d’ouvrir à l’espérance dans quelque forme de survie (résurrection, métamorphose). Chaque peuple les célèbre différemment, en fonction de ses croyances et de ses mythes propres. En Asie et en Amérique latine, ils sont liés au destin de la famille, du clan, de la secte. Le cri des pleureuses, le sacrifice d’animaux domestiques, la longue exposition du mort sur une estrade s’intègrent à une conception religieuse, à un imaginaire collectif par des fonctions symboliques. Par contre, et en rupture avec les images précédentes, les « funeral homes » des États-Unis relèvent de la convention sociale sans que personne, du moins en apparence, ne laisse percer d’émotion. Ce sont des offices mondains. Il en va de même des pratiques d’embaumement, de congélation ou d’incinération. Extrêmement perfectionnées, elles témoignent cependant de l’absence d’humanité d’une société cherchant à escamoter la réalité de la mort.
Malgré le caractère insoutenable de certaines images de ce documentaire, les auteurs ont su échapper à tout sensationnalisme, par leur effacement devant la gravité et la beauté, souvent, de la réalité montrée ainsi que par la qualité sensible de leur regard. (Serge Meurant)
